Le 1er avril, mes collègues et moi avons été convoqués à une réunion où nous avons appris que notre studio d’animation fermait ses portes et que nous allions perdre notre emploi. Cela fait suite à une vague de licenciements qui a eu lieu à la fin août l’an dernier, mais maintenant tous nos emplois sont perdus. La justification qui nous a été donnée est qu’après deux années de coupes successives dans les subventions aux studios d’animation au Québec, les banques n’étaient plus disposées à accorder des prêts à des taux concurrentiels, ce qui a forcé la fermeture.
Comparativement au reste de l’industrie, ces emplois étaient plutôt bons. Nous avions des journées de 7 heures, des salaires assez concurrentiels (pour une industrie qui est plutôt sous-payée) et une bonne équipe de travail. Nous étions fiers de la qualité artistique de notre travail et recevions souvent des compliments de nos clients.
Malheureusement, rien de tout cela n’importe aux forces aveugles du marché et face à la nécessité de maintenir une marge de profit. L’industrie de l’animation dépend fortement des subventions accordées par les différents gouvernements, dans une véritable course pour savoir qui fait la meilleure offre pour inciter les studios à embaucher dans leur région.
On pourrait penser que cela signifie que les studios d’animation sont assez stables, puisqu’ils peuvent s’engraisser avec l’aide de l’État. Cependant, comme ils sont en concurrence avec une multitude d’autres studios (qui sont également subventionnés par leurs gouvernements) pour obtenir des contrats, cela fait baisser les prix et les marges sont très minces. Cet argent ne « ruisselle » pas et ne crée même pas d’emplois stables! Au lieu de créer des emplois, les subventions ne font, dans le meilleur des cas, que les déplacer d’un côté à l’autre de la frontière.
En cette période d’austérité et de privatisation, les gouvernements de partout tentent de réduire les services sociaux et les dépenses en général. Au Québec, la CAQ a fait des coupes majeures dans ces subventions, mais je n’ai aucun espoir que le gouvernement que nous aurons en 2026 change les choses. Le capitalisme exige l’austérité, et aucun des principaux partis n’est prêt à rompre avec le capitalisme ou sa logique.
Pour être honnête, l’animation et les effets spéciaux sont une industrie mineure au Québec et au Canada, et dans le contexte d’une guerre commerciale, de coupes dans les dépenses sociales et d’une récession imminente, nous allons voir des entreprises beaucoup plus grandes et plus importantes fermer leurs portes et licencier des travailleurs. Si nous ne voulons pas que d’autres industries suivent l’industrie québécoise de l’animation, nous devons être prêts à lutter contre ces attaques par des mouvements de masse, des grèves et des occupations!